Un drame survient et tout serait subitement chamboulé. Assurés de leur victoire promise, les socialistes n'avaient qu'une seule crainte : qu'un événement inopiné (ils le sont souvent) ne vienne se placer sur la route de leur héros en marche triomphale quoique modeste vers l'Elyséee.
Ils redoutaient surtout une crise internationale – la plus ennuyeuse étant une explosion en plein vol de l'euro qui placerait leur champion dans la très délicate obligation de prendre position, à la fois sur l'heure et pour l'Histoire.
La « suspension » en question
En lieu et place d'une telle épreuve, les drames de Montauban et Toulouse peut faire – atrocités humaines mises à part – figure d'épreuve politique de second ordre. Comme de bien entendu, Nicolas Sarkozy s'est saisi de l'affreux événement pour endosser à nouveau son costume de Président afin de mieux poursuivre sa campagne électorale.
Il est permis de penser que François Hollande a eu tort de le suivre dans le choix de « suspendre » formellement la compétition présidentielle pendant quelques jours. Nombre de militants et responsables socialistes que j'ai pu rencontrer ces derniers jours, en ont été décontenancés.
On imagine sans peine le raisonnement qui est venu à l'appui de cette option. En cette époque de croyance démesurée en l'image et dans la communication, le candidat socialiste – dont la stature présidentielle reste partiellement à conquérir – ne pouvait, se sont répété ses savants conseillers, se permettre de ne pas être à l'unisson du semblant de communion nationale.
Ce faisant, Hollande s'est trouvé « conjoncturellement » dans le sillage d'un président-candidat Sarkozy qui a poursuivi son œuvre. Heureusement pour lui, le chef de l'Etat ne s'est pas véritablement montré à la hauteur des événements. Son étrange attitude devant les enfants des écoles – où, au risque de les effrayer en les présentant comme des victimes potentielles, il a privilégié le calcul politique de la peur sur sa fonction institutionnelle et protectrice consistant à rassurer la population – a sans doute été peu appréciée par les parents eux-mêmes, qui sont souvent des électeurs.
Petit bonus de premier tour
Les attaques caricaturales de la droite contre un PS ramené à une image d'angélisme, qui a cessé d'être une réalité depuis belle lurette, constituent une autre faute qui devrait interdire au candidat de l'UMP – bien mal secondé, consciemment ou inconsciemment, par l'étrange Jean-François Copé – de tirer durablement partie de cet épisode.
Mais c'est le Président sortant lui-même, subitement redevenu candidat, qui a instruit le procès imaginaire d'une gauche qui s'est bien gardé de trouver au tueur toulousain une quelconque explication sociétale. Il a pourtant déclaré, en meeting à Toulouse :
« Mettre en cause la société, montrer du doigt la France, la politique, les institutions, ce n'est pas digne. Ce n'est pas faire preuve d'un esprit de responsabilité dans un moment où la nation a d'abord besoin d'unité. »
Au total, le drame de Toulouse ne devrait pas bousculer la donne électorale. Certains de ses éléments m'ont laissé pensé que Marine Le Pen, plus encore que le candidat de l'UMP, pourrait en tirer profit.
Les premières enquêtes d'opinion, dont il faut toujours se méfier, n'en tirent pas ces enseignements. Sarkozy y bénéfice d'un petit bonus au premier tour, sans véritable effet au second tant le rejet qu'il subit est massif et, me semble-t-il, irrémédiable. Les événements de campagne ont leur importance. Mais les électeurs ont bien d'autres préoccupations que les sujets de l'actualité.
Article publié sur Rue89.
Suivre une campagne électorale est une perte de temps, les promesses sont des billevesées quelques soient les candidats. Il y a longtemps que mon opinion est faite à partir des faits.
Votre analyse est tout à fait probante.
Rédigé par : GED | 26 mars 2012 à 18h01
« Les événements de campagne ont leur importance. Mais les électeurs ont bien d'autres préoccupations que les sujets de l'actualité. », nous dit Eric Dupin qui parle d’or. « It’s the economy, stupid. » : on connait la fameuse formule de Clinton à propos de George Bush senior qui pensait, comme Sarkozy, que ses succès, et sa stature, sur la scène internationale assureraient sa réélection en 1992
Car les tendances de fond de l’économie annoncent la défaite inéluctable de Sarkozy. Mieux que tout sondage, un chiffre explique pourquoi : il y avait 2 millions de chômeurs au début de l’année 2008 (taux de chômage : 7,2%). A la fin 2011, il y en avait près de 2,7 millions (taux de chômage : 9,8%). Soit une augmentation d’environ 35% en quatre ans. Pour que Sarkozy gagne dans un tel contexte, il faudrait qu’il soit un génie de la politique. A vérifier dans 6 semaines.
Rédigé par : René Fiévet | 26 mars 2012 à 22h15
"Heureusement pour lui, le chef de l'Etat ne s'est pas véritablement montré à la hauteur des événements".
Pourtant d'après une étude d'opinion, il semble que 74 % de nos concitoyens pensent le contraire. Mais vous êtes journalistes et de gauche donc par définition vous détenez la vérité. et vous faites donc partie de ces 26 % qui voudraient imposer le silence à ceux qui pensent différemment. A quoi bon se forger sa propre opinion et l'exprimer, puisque ce que pense l'élite journalistique est déjà clairement établi et qu'elle ne laisse aucune chance de voir retenue l'idée qu'un autre point de vue puisse être abordé.
Enfin les 74% pourront se consoler avec ce passsage de la Bible "Heureux sont les simples d'esprit car le royaume des cieux leur appartient" .
Rédigé par : Flamant rose | 27 mars 2012 à 10h57
L’actuel locataire de l’Elysée n’a pas retiré de l’événement Merah une image de rassembleur; cette mythologie, comme toutes les autres, s’essouffle. La nation s’est simplement rassemblée, humainement, autour des victimes.
Quant à lui, il a seulement montré qu’il détenait le monopole de la violence légitime, en tant que chef de l’Etat. Mais il n’y a rien là qui puisse faire frémir plus que cela les sondages. Les français, en particulier les plus pauvres, sont habitués à associer le nom de cet individu à l’idée de violence, qu’elle soit légitime ou non, qu’elle soit physique ou symbolique.
Rédigé par : D.H. | 27 mars 2012 à 13h10
Ma fille qui habite Toulouse m'a téléphoné ce matin bouleversée. Elle voulait me parler de la suite des événements Toulousains, parce que personne n'en parle. Elle m'a dit qu'il y avait peu de monde lors de la marche silencieuse consacrée aux victimes, et, en particulier, très peu de représentants de la communauté musulmane. Par contre, l'immeuble de Mehra (une amie de ma fille habite en face) était couvert de fleurs.
Rédigé par : Michel | 27 mars 2012 à 15h29
"Il est permis de penser que François Hollande a eu tort de le suivre dans le choix de « suspendre » formellement la compétition présidentielle pendant quelques jours. Nombre de militants et responsables socialistes que j'ai pu rencontrer ces derniers jours, en ont été décontenancés."
Dites-vous, Eric Dupin. Or tous vos confrères se gargarisent (et nous bassinent) avec le fait que c'est Hollande qui, le premier, a décidé de suspendre la campagne. Et en effet, j'ai entendu cette info une ou deux heures à peine après l'annonce de la barbarie islamofasciste.
Comme j'avais entendu, une ou deux heures AVANT une petite brève politique trés instructive sur la campagne (Alba Ventura sur RTL), disant la fatigue du pôvre candidat socialo, même obligé la veille lors d'une visite, de s'asseoir quelques minutes !! Renseignements pris, le QG avait reconnu l'obligation qu'il y avait à lui ménager une semaine de campagne allégée.
De là à penser que Mohamed avait utilement choisi son moment....
Eh bien, j'oserai ! Hollande et le PS ne sont, là encore, qu'imposture dans la posture.
Rédigé par : Anne | 27 mars 2012 à 16h10
- Michel vous avez raison : personne ne parle de ce qui se passe à Toulouse. Enfin, de ce qui gêne notre belle classe médiatique, préférant laisser la poussière sous le tapis pour permettre à Hollande....de l'y laisser.
En particulier les rassemblements de musulmans, avec femmes entièrement voilées (mais qui ne seront pas inquiétées pour leur violation de la loi), qui arranguent les curieux/choqués en leur disant "bon, çà y est maintenant, Mohamed est mort. Nous comprenons la douleur des victimes (sic), mais nous aussi nous avons perdu un frère".
A vomir....
- C'est là que la décence de D.H. à parler ici de la violence de N Sarkozy prend vraiment toute sa valeur.
Rédigé par : Anne | 27 mars 2012 à 16h22
Remballez votre guerre des civilisations et renoncez à exploiter l'événement Merah à des fins électoralistes, et on pourra ensuite reparler de ce qui est décent ou ce qui ne l'est pas.
Rédigé par : D.H. | 27 mars 2012 à 17h33
Mais je ne cherche pas à exploiter quoique ce soit.
Contrairement à ceux qui vont jusqu'à lancer des polémiques sur le RAID, ne craignant pas de nous sortir opportunément de la naphtaline le "parfait" Prouteau, sans jamais rappeler ces hauts faits d'armes...Ni bien entendu sa proximité avec Mitterand dont il n'a été qu'un homme-lige, avec les succés que l'on sait.
Enfin, que beaucoup des plus jeunes générations ignorent, justement !
Je ne fais que constater où sont l'indécence et le cynisme absolu.
D'ailleurs et hélas, l'anti sarkozisme primaire et imbécile n'y est pour rien, ou à peine exacerbé : c'est depuis toujours la marque de fabrique de toute la gauche française, avec l'appui bienveillant de 90% de nos baveux.
Tiens à ce propos, lors de son meeting à Marseille le 14 mars dernier, l'honorable Hollande a dit exactement :
« Je ne propose pas je-ne-sais-quel plan Marshall pour les banlieues. Personne ne sait d'ailleurs dans les banlieues qui était le général Marshall, même si c'était un homme estimable. »
Per-son-ne ne l'a repris, alors que la moindre phrase de Sarko est scrutée à la loupe pour trouver le mot qui pourra faire une semaine de polémique !!
Et pourtant, cette saillie sent le surmoi qui se lâche, et a quelque chose du dérapage aux relents nauséabonds, vous ne trouvez-pas ? Ils les prend vraiment pour des c...., non !!??
Imaginons que Sarko ait osé sortir une énormité pareille....
Ben là, çà passe.
Alors lâchez-moi avec la guerre de civilisation et la violence de Sarko !
Mais je comprends votre déception et votre aigreur : il aurait été tellement jouissif de pouvoir rendre Sarko responsable de cette barbarie d'une façon ou d'une autre.
Oh, Je sais que vous saurez, vous et tous les vôtres, faire de cette tragédie un simple fait divers, mais qui aurait été un crime politique voire un crime contre l'humanité s'il n'avait pas été commis par un M.Merah !
Le lavage de cerveau, au bout de 30 ans, a bien fonctionné...
Rédigé par : Anne | 27 mars 2012 à 18h13
http://www.in-nocence.org/public_forum/read.php?3,106204,106324
http://tempsreel.nouvelobs.com/social/20120314.FAP1619/banlieue-hollande-propose-de-supprimer-les-zones-urbaines-sensibles.html
http://www.leparisien.fr/election-presidentielle-2012/en-direct-sarkozy-les-francais-sont-disponibles-comme-jamais-14-03-2012-190
Pour Anne !
Rédigé par : CM | 28 mars 2012 à 08h53
@ CM,
Et alors ? Cette phrase de Hollande a été citée dans des médias/papier ? La belle affaire !
Ne faites pas semblant de ne pas comprendre, un peu de bonne foi de temps en temps n'a jamais tué personne...
Si Sarko l'avait prononcée, elle aurait fait la Une de tous les grands médias radio-télévisuels, reprise en boucle, et en tête des pages d'accueil des principaux navigateurs.
+ débats, commentaires incendiaires et réactions outragées, accusations de racisme et xénophobie à n'en plus finir dans les émissions idoines.
Dans le NouvelObs et Le Parisien, cette phrase est qualifiée au pire de simple maladresse et au mieux de raillerie...
Au temps pour l'honnêteté intellectuelle de ce que d'aucuns appellent les journalistes français, profession ayant a priori une déontologie d'impartialité minimum à respecter.
Ah mais au fait, et pour changer de sujet : après la suppression du mot "race" de la Constitution qui le gêne, bientôt celui d'euthanasie qu'il n'aime pas (Monsieur l'a annoncé lors de son Des Actes et des Paroles), assumant ainsi sa décision de légalisation avec le grand courage et les convictions qui le caractérisent, voilà qu'il se propose de supprimer le vocable "zones urbaines sensibles", trop discriminantes ?
C'est déjà, pourtant, un euphémisme !
Je sens que le mot "diversité" a du souci à se faire...
Misère, c'est vraiment ce machin - cette fraise des bois, pardon - que les Français veulent voir accéder à la présidence de leur pays ?
Rédigé par : Anne | 28 mars 2012 à 15h09