Les élections européennes de juin prochain se profilent comme une rude épreuve pour les deux principaux partis de gouvernement. Ce scrutin sera le premier à se dérouler en période de crise économique aigüe. L’UMP et le PS peuvent légitiment craindre qu’un tel contexte profite aux multiples forces protestataires qui excellent traditionnellement à profiter de la tribune que leur offre des élections européennes privées d’enjeu propre fort.
PS et UMP risquent aussi d’être sur la défensive face à la question qui dominera cette campagne. L’idée, avancée par Nicolas Sarkozy, d’une « Europe qui protège » peut aisément nourrir une thématique protectionniste. Il est fort possible que le débat des prochaines européennes tourne autour de l’opportunité d’une protection des marchés, au moins au niveau de l’Union. Pour des raisons évidentes, le PS et l’UMP auront plus de mal que d’autres à satisfaire ce type d’aspirations.
Le parti du président sait que le scrutin de juin s’annonce délicat. Sorte de défouloirs électoraux qui se jouent à la proportionnelle, les batailles européennes sont toujours difficiles pour les formations au pouvoir. Celles-ci doivent généralement se contenter de 20 à 25% des suffrages exprimés. En 2004, l’UMP a même plongé en-dessous de 17% des voix. L’impopularité de l’exécutif n’aidera pas, cette année, les partisans du chef de l’Etat. L’éventualité d’une répétition du vote-sanction, qui avait déjà coûté de nombreuses villes à l’UMP aux municipales de mars 2008, plane comme une menace réelle sur le parti désormais dirigé par Xavier Bertrand.
Le score de l’UMP est surtout menacé par la possible percée des listes souverainistes de Philippe de Villiers. Depuis 1994, ce courant de droite à l’hostilité déclarée à la construction européenne réussit à séduire une fraction notable de l’électorat. Le dirigeant vendéen avait rassemblé 12,3% des suffrages il y a quinze ans tandis que Charles Pasqua recueillait 13,1% des voix il y a dix ans. En ces temps troublés, Villiers espère obtenir un score bien supérieur à celui qu’il avait obtenu en 2004 (6,7%).
Seule consolation pour le grand parti de droite : le Front national ne devrait guère être en mesure de reconquérir le terrain perdu à la dernière élection présidentielle. Le parti de Jean-Marie Le Pen est à nouveau secoué par de graves turbulences internes. En 1999, il s’était replié sur 5,7% des voix en raison de la scission conduite par Bruno Mégret. La formation d’extrême droite, qui caracolait au-dessus des 10% de suffrages exprimés aux européennes entre 1984 et 1994, aura le plus grand mal à rééditer son score d’il y a cinq ans (9,8%).
Les malheurs possibles de l’UMP ne feront toutefois pas automatiquement le bonheur du PS. Les socialistes s’apprêtent à faire face à forte concurrence. Ils savent que le scrutin européen, propice à la dispersion des votes, ne leur est pas favorable. En moyenne, le PS n’obtient que de 20 à 25% des suffrages exprimés. Il a même connu un accident électoral en 1994 lorsque la liste conduite par Michel Rocard s’est écroulée à 14,5% des voix. Son meilleur score a été enregistré en 2004 avec 28,9% des suffrages. Handicapé par des désaccords internes persistants sur la question européenne, le PS aura cependant le plus grand mal à renouveler cet exploit en juin.
Il devra d’abord affronter, sur sa gauche, de nouvelles forces dans un espace électoral en extension. Une enquête Ifop commandée par le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon attribuait, en janvier, 14,5% des intentions de vote à des listes « d’union de l’autre gauche rassemblant Lutte Ouvrière, le Nouveau Parti Anticapitaliste, les Alternatifs, le Parti Communiste et le Parti de Gauche ». Une telle alliance n’a pratiquement aucune change de se réaliser mais ce chiffre témoigne de la vigueur de ce secteur de l’opinion. A défaut d’union, les européennes seront un test décisif à la fois pour le NPA et pour le PG, probablement allié au PCF.
Le PS risque aussi de voir certains de ses électeurs l’abandonner au profit des listes écologistes dopées par l’unité des différentes composantes de cette mouvance autour de Daniel Cohn-Bendit. Ce courant obtient habituellement d’assez bons résultats lors des compétitions européennes. Et l’ancienne icône de mai 1968, qui avait obtenu 9,7% des voix en 1999, est une locomotive électorale éprouvée.
Dernier concurrent dangereux pour le PS, et non le moindre : le Modem de François Bayrou. Le dirigeant centriste, qui avait rassemblé 12% des suffrages il y a cinq ans, s’efforce d’apparaître comme le meilleur opposant à Nicolas Sarkozy. Il a su mettre en avant de nouvelles têtes issues de la société civile comme Jean-François Kahn ou Robert Rochefort. Les électeurs désireux de condamner en juin le pouvoir en place n’auront que l’embarras du choix.
Article publié dans Enjeux-Les Echos de mars 2009.
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