Ma Photo

septembre 2017

lun. mar. mer. jeu. ven. sam. dim.
        1 2 3
4 5 6 7 8 9 10
11 12 13 14 15 16 17
18 19 20 21 22 23 24
25 26 27 28 29 30  

--------------------------

RECHERCHE

  • Google

----

Blog powered by Typepad

script mobile

« Trêve pyrotechnique | Accueil | Creux Royal »

21 juin 2006

Commentaires

noop

C'est vrai qu'il y a comme une sorte de téléscopage et de contradiction. Au moment où, pour plusieurs raisons, nous effaçons petit à petit nos racines judéo-chrétiennes et gréco-romaines, où nous nous en éloignons, nos dirigeants, toutes tendances confondues, célèbrent l'art premier (ex-primitif devenu politiquement incorrect) avec en idée sous-jacente et honorable de donner à une partie de notre population, d'origine immigrée, un sentiment de fierté, de valorisation et aussi à notre population dans son ensemble l'occasion de prendre connaissance de cette culture.
Moi je ne peux m'empécher d'y voir un raccourci du problème qui se pose à nous européens. Pourrons nous à la fois intégrer le monde (ni plus ni moins, nous dissoudre, nous fondre est plus juste) et dans quelques dizaines d'années au train où vont les choses, continuer à nous reconnaître avec plaisir dans notre culture et même à l'identifier ? Où sommes nous condamnés à dévaloriser et à gommer celle-ci, comme cela à déjà été fait pour les cultures régionales, et dans le même temps à valoriser les autres, afin de se mettre en adéquation avec le monde nouveau, fait de déracinement, de relativisation, de nomadisme et de surreprésentation de toutes les minorités, qu'elles soient visibles, culturelles, sexuelles, politiques ?
Je ne pense pas qu'il s'agisse de standardisation ou d'uniformisation, mais bien du refus de la majorité, volontairement minorée. Dont l'avis même dérange trop souvent (voir l'Europe).
Quant à la "sagesse ancestrale" et autre "mythes merveilleux" des peuples africains (et au-delà), permettez moi d'en douter, quand je vois l'état du continent africain, dont il est exagéré et mensongé de dire que nous en avons seuls la responsabilité.

bernique

Bla bla bla de Chirac
Ce musée en est la preuve comme le Louvre:
La raison du plus fort est toujours la meilleure.
Quel humanisme en guimauve!

PMB

Bravo. On a vexé Eric Dupin avec nos remarques sur son "absence", et il nous balance du trapu. J'y reviendrai, ainsi que sur le comment de Noos. Mais il me faut du temps pour ne pas dire n'importe quoi. Enfin, essayer !

Heu..., Bernique, vous pourriez argumenter ?

bernique

Comment croyez vous que sont arrivées en France ces 350.000 pièces du musée dont 10% exposées comme au Louvre tous les trésors grecs etc...Que faisaient Clara et André Malraux à Angkor?
Or Chirac faiait un discours trés humaniste sur les cultures dans un milieu ou se concentrent tant de pillages.
Il n'est pas d'exemple dans l'Histoire que l'on ait respecté les cultures indigènes (au sens général de ce mot). Les cultures sont comme les peuples, elles passent et trépassent (oubli compris) avec eux tombant sous le coup de leur auto-extinction ou, plus surement, celui de leur asservissement à plus fort.
Le discours chiraquien me faisait penser à Hulot et ses appels désespérés pour Dieu sait quel paradis inconnu.
Alors le musée du quai Branly ? commece lui du Louvre et tant d'autres. Des cimetières de culture où l'on peut se promener ou préparer une thèse. Rien d'autre. Leur éphémérité fixée dans la durée du musée est un attrape gogo. Une sorte de vitrine pour collection des tabatières ou éventails de grand maman des appartements bourgeois.
Une sorte d'affichage coûteux de son contentement, de la suffisance: celle du plus fort ou qui le fut et le reste un peu encore, une sorte de lot de consolation.
Mais elles sont en soi insignifiantes sauf à avoir apporté parfois à un instant T quelque chose au cours du fleuve appelé Humanité qui dévore tout sur son passage et rejette quelques excréments: ruines, fossiles d'existences; elles n'influencent pas l'homme en fait au point de LE faire. Ce ne sont que vanités, apaisements!
Un musée des arts dits premiers (ce qui ne fait aucun sens car il n'y a ni premiers ni derniers) a donc quelque chose de morbide. Mais chirac cherche désespérément à se donner une stature historique, à créer un souvenir éternel, muséifié.
Voilà à peu près ce que j'entendais.

blabla

Le Chi nous a depuis longtemps habitué aux discours de vieux sage. Drôle de personnage vraiment, les historiens auront fort à faire... Le pire étant qu'il paraît si emprunt de gravité et de conviction quand il s'enflamme pour la défenses des "cultures autres", des "peuples premiers" ou dans un autre registre des conséquences d'une mondialisation mal régulée.
Le propos est noble (qui dirait le contraire), le verbe juste, lyrique même.
Le problème, car il y en a un selon moi, c'est qu'il fait quoi le Président de la République pour joindre les actes à la parole ? Est-il vraiment cynique, les mots n'étant pour lui que des jouets destinés à mieux séduire l'opinion pourvu que l'Histoire lui réserve une place même un strapontin, ou bien y croit-il malgré tout, et malgré lui puisqu'il doit bien deviner au fond qu'il est le premier à ne rien faire pour que les choses changent. Car enfin, le respect de la diversité, des minorités et de leurs particularismes, il est où dans son bilan de Président ?
Plus cela va et plus je comprends pourquoi et comment il a du être fasciné par Villepin, un autre faiseur de pluie, déversant des mots comme pendant l'averse, s'enivrant de ses propres propos, intimidé par sa propre audace, pour au total faire si peu et si mal car si seul contre tous (mais c'est là sans doute la beauté de la chose....).
Les fins de règne versent souvent dans le mysticisme, le temps pressant. J'ai l'impression que le grand Jacques n'y échappe pas.

Erick

Bernique est trés fort : quel art de faire coïncider la teneur de ses propos avec son pseudo !

C' est vrai que Mr Dupin nous donne du fort à penser. Non que le fond de son propos soit parfaitement original mais 1) l' occasion ne pouvait pas mieux être choisie et 2) il est bon d' être rappelé à plus sérieux que tout ce qui a donné lieu à tant de bavasseries depuis quelques mois.
Il me semble déceler un certain pessimisme dans ce "papier" et il est difficile de ne pas le partager. Si l' on admet que la Culture et ses différentes manifestations sont oeuvres de spiritualité, il est à craindre malheureusement que Malraux pourrait avec raison dans le deuxième terme de sa "prophétie" sur le 21eme siècle.

PMB

Erick : "Bernique est trés fort : quel art de faire coïncider la teneur de ses propos avec son pseudo !"

Heu... Erick, vous pourriez argumenter ?
(Je dis ça parce que si ça marche ausi bien qu'avec Bernique, on en aura pour notre argent ;-)

christian

Jacques Chirac est peut-être sincère, mais un Président de la République française a d'autres pouvoirs que celui d'inaugurer des musées. Il avait promis que la France signerait et ratifierait la charte européenne des langues minoritaires, charte désormais obligatoire pour les Etats voulant adhérer à l'Union européenne. Résultat, Jospin a signé cette charte et 1997 et Chirac a botté en touche en demandant l'avis du Conseil constitutionnel (ou celui du Conseil d'Etat). Résultat cette charte, qui donnerait quelques moyens aux minorités linguistiques françaises et une reconnaissance officielle de plusieurs langues régionales (basque, alsacien, breton, occitan...), est toujours en rade. Belle exemple d'action présidentielle. Les cultures, Jacques Chirac semble les préférer au musée que réellement vivante. Chacun ses goûts.

Siganus Sutor

Des “peuples menacés par l'avancée inexorable de la modernité” ? Mais quelle horreur ! Que font donc Amnesty International, l'Unesco et Brigitte Bardot unis pour la bonne cause ? Ils sont de bons sauvages ? Oups ! pardon : Ils sont de bons premiers ? Mais quelle chance n'ont-ils pas ! Surtout, qu'ils le restent ! Ne sont-ils pas heureux ainsi, loin des maux du monde moderne ? Qu'ont-ils donc besoin d'avoir le téléphone portable, internet et une vignette automobile à payer ?

Franchement, malgré toutes les bonnes intentions éventuelles, quelle condescendance que de donner un tel nom à ce musée... Admettre implicitement que les statuettes bambara ou les masques sepik sont plus “premiers” que le David de Michel-Ange ou les œufs de Fabergé, n'est-ce pas tomber dans une forme de mépris officialisé ? Qu'en Nouvelle-Calédonie il y ait un centre culturel canaque, tant mieux, mais avoir un musée de primitifs* à Paris, fut un temps capitale d'empire colonial...

Le 3 février dernier sur France Inter un certain Pierre de Vallombreuse, “ethno-photographe engagé”, passait dans une émission. A l'écouter déplorer la disparition des dernières “parcelles de vie première”, se lamenter à propos du paradis perdu et regretter l'acculturation dont seraient victimes les sociétés tribales, on croyait entendre un zoologiste s'insurgeant contre l'extinction des pandas géants ou des aras d'Amazonie. On aurait eu envie de lui dire : « Cher Monsieur, vous qui êtes sans doute fort aise de pouvoir voyager en Boeing, avoir votre Nikon et utiliser une carte VISA — sans compter l'assurance vous couvrant en cas de rapatriement sanitaire vers un hôpital “moderne” —, comment pouvez-vous donc trouver “dommage” qu'un “homme premier” ait envie de vivre comme vous ? »


* premier, primitif, même racine — comme primate d'ailleurs

PMB

Siganus,

Je ne voyage pas en Boeing avec Nikon et Visa Card. Et je ne peux pas trouver dommage qu'un homme premier ait envie de vivre comme nous pour la bonne raison qu'aucun, heureusement, ne m'en demande la permission.
Pour autant ça ne me réjouit guère car c'est le dernier mais pas ultime avatar de la colonisation, qui consista entre autres à "tuer des civilisations sans prix mais non sans valeurs, infliger à des tribus joyeuses, fières et naïves le travail, la neurasthénie et les caleçons troués."

Robert Marchenoir

C'est exaspérant, cette névrose politiquement correcte qui se noue autour du musée du Quai Branly. Quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, le débat est piégé.

Nos grands musées ignorent les cultures indigènes des peuples non occidentaux? Nous voilà accusés de racisme, de colonialisme, d'ethnocentrisme. On bâtit un grand musée des arts primitifs en mobilisant le meilleur de nos savants, de nos historiens d'art, de nos collectionneurs, de nos ethnologues, de nos architectes? Nous voilà accusés derechef de racisme, de colonialisme, d'ethnocentrisme.

Après, les professionnels de l'indignation, de la repentance et de l'anti-racisme s'en donnent à coeur joie dans la bataille des mots, là où ils excellent.

Arts primitifs? Méprisant. Arts premiers? Néo-colonial. Musée des arts d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et des Amériques? Ah ben non, c'est raciste, parce que dans tous ces continents, il y a des types qui font des installations vidéo aussi nulles et chiantes que nos artistes contemporains à nous, et elles sont pas dans le Musée Sans Nom (d'ailleurs, il faudra me corriger cette lacune, n'est-ce pas, Monsieur le Conservateur?).

Et Quai Branly? Ah oui, tiens, quai Branly. Ca, ça tiendra bien un certain temps, jusqu'à ce qu'un flic de la pensée découvre un jour que Branly a écrit "nègre" dans une lettre, qu'il a fait un bâtard à une bonne des colonies, ou qu'il a dessiné la boîte de Banania...

Et voilà comment, avec la petite pensée mesquine et puante des professionnels du ressentiment et de leurs valets, on transforme une magnifique création culturelle, un hommage à la beauté de la création humaine, en un chaudron malsain d'où s'échappent les remugles sans cesse touillés de la haine et de la jalousie.

PMB

Branly n'a pas fait de bâtard à Miss YabonBanania, mais il a inventé la branlette.

(Désolé ED, mais je fais tout ce que peux pour échapper à la sinistrose et à la corde qui va avec. Bon, il est 23h, à deux mains, si vous le voulez bien...)

Erick

PMB,

Je réagissais au premier commentaire de Bernique dont je ne saisissais pas l' objet et que je trouvais plutôt vide de sens. Avec un bon dictionnaire, vous trouverez le sens de l' expression "bernique".
Je dois reconnaître qu' il s' est bien rattrapé par la suite, que l' on soit d' accord ou non avec son point de vue.

fradet

une bernique peut en cacher une autre... Bernique. Bernique alors!

bernique

puis-je me permettre d'ajouter ce qu'écrit Attali ce jour dans l'Express et avec quoi je suis bien d'accord, notamment ce qui concerneces fameux arts, ce ne sont pas des arts au sens qu'on donne à ce mot mais des moyens de médiation ou de communication ...avec la divinité.

litoreus

Ah, Marchenoir ! « Les remugles sans cesse touillés de la haine et de la jalousie. » C’est-y pas beau, ça ? Grandiose, même, en y mettant le ton. Je l’imagine dit de cette voix nasillarde qu’avaient certains tribuns des années 20 à 40 du siècle passé. Avec un soupçon d’emphase et de pathos : irrésistible ! Il y a même une touche de prosodie là-dedans ! Vous-vous surpassez, dites donc… si, si, ne soyez pas modeste, pour une fois ! Il m’a été rapporté que Léon Bloy (tiens, tiens, encore lui), Léon Daudet, Céline, Rebatet… vos grands aînés, quoi, vous ouvrent les bras ! Ils s’apprêtent à vous faire la haie d’honneur sur les degrés du Temple de l’Acrimonie. Un tuyau : je pense qu’Alka-Seltzer ne se fera pas prier pour sponsoriser la cérémonie, les fielleux, ils connaissent, ils savent les traiter « aux petits oignons ». Et puis, soyez bon prince, venez donc avec le jeune Houellebecq, ça lui fera plaisir.

noop

Litoreus, ça dégénère, non ?
Pourquoi tand d'ironie acide à l'encontre d'une personne (Marchenoir) ? N'est-il pas possible de discuter sans tomber dans l'agressivité et l'insulte ad-nominem. Opposons des idées. Evitons de s'en prendre aux personnes et caractéristiques supposées... "Cette voie nas(z?)illiarde des tribuns des années 20 à 40" me fait furieusement penser "au nez crochu du juif responsable de tout" des mêmes années...

Ne pensez-vous pas que quand Marchenoir dit "Et voilà comment, avec la petite pensée mesquine et puante des professionnels du ressentiment et de leurs valets, on transforme une magnifique création culturelle, un hommage à la beauté de la création humaine, en un chaudron malsain d'où s'échappent les remugles sans cesse touillés de la haine et de la jalousie." il touche du doigt la difficulté actuelle grandissante pour nos hommes politiques de faire passer le fond avant la forme, l'idée avant la "comm"...
De plus en plus il semble, comme le disait Max Gallo hier chez Fog, que l'on ne puisse plus écouter une idée, mais d'abord voir de qui elle vient avant tout pour la déclarer recevable ou non. Ami ou ennemi ?
Cette façon nous enferme dans une partie d'échec sans signification autre que le pouvoir pour le pouvoir, ou la fin justifie de plus en plus les moyens.

Ce musée est une bonne idée. Mais comme on le lit, il sera critiqué par ceux qui ont une posture post(anti)-colonial, par ceux qui ont une posture post(nostalgique)-coloniale, par ceux qui ont une posture raciste etc etc... et ce sont toutes ces minorités que l'on entend aujourd'hui, au détriment d'une majorité silencieuse qui pourtant bout de plus en plus.

Erick

Litoreus,

A vous lire on a bien le sentiment que Marchenoir a mis dans le mille !

C' est vous qui parlez de fiel ?

Siganus Sutor

Litoreus, si vous aimez donner des coups de garcette, donnez-les au moins avec un peu d'humour et de légèreté — et un chouia de tendresse. Qui châtie bien aime bien dit-on ?

PMB

Repens-toi, Litoreus, vil sacrilège, contempteur de la Science, manant qui prétends à la critique ! Personne ne t'aime et tout le monde te châtie !

Erick

Litoreus à se repentir
Par PMB
Fut appelé
Sans qu' il lui fut demandé
D' argumenter.
Mais enfin, sans rire,
Qu' attend-on de ce critique ?

Bernique !

Robert Marchenoir

Léon Bloy est un très grand écrivain.

Il avait une foi immense dans l'humanité. C'était un homme libre, ce qui est une denrée fort rare aujourd'hui.

J'invite à redécouvrir son oeuvre tous ceux qui ne se satisfont pas du pissat de souris qu'est devenue une bonne partie de la littérature française contemporaine. Ils découvriront à quel point Léon Bloy entre en résonance avec la société actuelle; à quel point son écriture et sa voix nous sont nécessaires, aujourd'hui plus que jamais.

Abracadabra

Comment déshabiller Paul pour habiller Jacques ? Le Musée de l'Homme s'en tirait très bien tout seul avant que notre grand couillon national s'avise de laisser son empreinte dans la paysage... et en plus Musée de l'Homme c'est un joli nom qui a le mérite de souligner l'universalisme, le vrai.

PMB

@ Litoreus : et de un !

(Erick, quel est ce lien mystère : )

Pour faire court sur cette note, en attendant d'y revenir : je suis souvent gêné de voir atterrir dans des musées des objets qui n'ont pas été créés pour ça. Surtout si ce sont des objets sacrés. Et c'est un sacré impie qui le dit.

PMB

Ceux qui ne se satisfont pas du pissat de souris qu'est devenue une bonne partie de la littérature française contemporaine, je les invite à lire "L'imitation du bonheur" de Jean Rouaud, membre actif de la littérature française contemporaine.
"Ils sentiront (dans peu nom de Dieu)
Qu'la Commune n'est pas morte."

flamant rose

On peut ne pas aimer Jacques Chirac, on peut même le traiter de grand couillon national mais il y a une chose qu’on doit lui reconnaître : Il aime l’Afrique, sa culture et son art, cela ne date pas d’aujourd’hui et cela n’est pas discutable.

J’ai proposé il y a plusieurs années, une vaste alliance pour le développement qui permette notamment aux Européens de faire pour l’Afrique ce que les Etats Unis ont fait il y a trente cinq ans pour le redressement de l’Europe. Croyez bien que je ne renonce pas à cette idée quelles qu’en soient les difficultés. On attend beaucoup de la France dans ce domaine : elle doit chercher à introduire plus de justice parmi les nations et parmi les hommes, et aussi plus de fraternité. Il ne s’agit pas de limiter notre ambiance au nouvel ordre économique international, il faut aussi rechercher un nouvel ordre culturel mondial qui puisse déboucher sur une véritable civilisation de l’universel.

Jacques Chirac. Hotel de ville de Paris, 24 novembre 1981.

Abracadabra

Avec le recul qu'accordent deux décennies et plus, cette citation est dévastatrice. Impitoyable Flamant Rose!

Robert Marchenoir

Lu dans le Monde aujourd'hui:

"Une cérémonie traditionnelle aborigène, censée 'purifier' l'espace et créer un lien spirituel entre le musée du quai Branly et les artistes aborigènes qui y ont travaillé, a été organisée vendredi, quelques minutes avant l'ouverture au grand public."

"Une quinzaine de chanteurs et danseurs ont pendant un quart d'heure exécuté des danses et des chants traditionnels des territoires de Nouvelle-Galles du sud (Australie) et des îles du détroit de Torres (entre l'Australie et la Nouvelle Guinée) pour 'accueillir le public sur les terres ancestrales et honorer leurs hôtes'."

L'existence de cet événement, et la façon dont le Monde le présente, montre bien:

1) La capitulation de l'Occident face à la superstition.

2) L'abandon par la France de sa souveraineté nationale. (Comment des Australiens peuvent-ils accueillir des Français sur leurs "terres ancestrales" situées au coeur de Paris? Jusqu'à nouvel ordre, le musée du Quai Branly n'est pas une annexe de l'ambassade australienne qui bénéficierait de l'extra-territorialité. Jusqu'à nouvel ordre, l' "hôte", c'est la France et non l'Australie.)

3) L'auto-dénigrement implicite de la culture nationale et européenne, sous couvert de promotion des cultures ignorées.

4) Le triomphe de l'exotisme touristique de pacotille, sous le couvert de l' "ouverture aux cultures des autres" et du "spectacle vivant".

Bref, ce petit chef-d'oeuvre du Monde confirme la dérive politiquement correcte du chiraquisme, qui, hélas, sur ce point, représente parfaitement la majorité des Français.

Voilà comment saboter une magnifique idée, et transformer une entreprise artistique en mauvaise action politique et morale.

PMB

Cher S..., argumentons donc sur les textes de RM.

RM : 1) « La capitulation de l'Occident face à la superstition. »
- La superstition n’est jamais que la croyance des autres. Ce qui me pourrait faire dire que toute croyance, catholicisme compris donc, est de la superstition. Hé bien, malgré mon athéisme en béton béni, je ne le dis pas.
RM 2) « L'abandon par la France de sa souveraineté nationale. (... Jusqu'à nouvel ordre, l' "hôte", c'est la France et non l'Australie.) »
- Jusqu’à nouvel ordre, personne ne voit un tel abandon : l’ armée australienne n’a pas encore pris le contrôle des carrefours de Paris. Surtout qu’il s’agit de peuples aborigènes, copieusement écrasés par les Australiens blancs. Jusqu’à nouvel ordre, la politesse dans l’accueil d’un invité a du bon.
RM 3) « L'auto-dénigrement implicite de la culture nationale et européenne, sous couvert de promotion des cultures ignorées. »
- Reconnaître les valeurs de cultures ignorées voire méprisées ne rend en rien implicite quelque auto-dénigrement de la culture nationale et européenne. Ce n’est pas parce que j’aime le vin blanc que je m'abandonne au dénigrement du vin rouge : j’aime les deux. Moi, je n’aime jamais assez de vinicultures, d’agricultures et même et surtout de cultures ; moi, je n’aime jamais assez de gens. Un peu cucul, hein ?
RM 4) « Le triomphe de l'exotisme touristique de pacotille... »
Chassez le mépris, il revient au galop.

Robert Marchenoir

Sur la polémique consistant à contester à un musée le droit d'exposer des objets de culte, ou des objets non créés pour les musées: comme par hasard, on n'éprouve ce genre de scrupule politiquement correct que quand il s'agit d'art africain, ou provenant d'autres "peuples opprimés par l'Occident".

Personne ne s'indigne que des tableaux de Poussin ou des statues romaines se retrouvent dans des musées. Or bien entendu, ni les uns ni les autres n'ont été créés pour être exposés dans des musées.

En fait, aucune oeuvre d'art n'a été créée pour se retrouver dans un musée, sauf les "oeuvres" de nombreux "artistes" contemporains qui n'ont été créées que pour cela, trahissant, ainsi, leur statut d'objet purement marchand et non d'oeuvre d'art, créé par et pour des esclaves volontaires du système capitaliste.

Par ailleurs, si on devait exclure tous les objets sacrés des musées, il faudrait fermer la plupart de ces derniers. Une bonne partie des trésors exposés par les musées sont à thème religieux, expriment la foi de leur auteur et célèbrent la gloire de la divinité.

Pour ne pas parler des objets spécifiquement destinés au culte. Les ciboires ou les Bibles enluminées du musée de Cluny, par exemple. Ou les icônes orthodoxes, qui ont exactement le même statut que les masques africains: elles ont été créés par des artistes anonymes, souvent des moines, dans un but exclusivement religieux. Encore de nos jours, un musée russe prête régulièrement certaines de ses icônes les plus précieuses à l'Eglise orthodoxe, pour qu'elles soient présentées lors de processions.

Evidemment, toutes ces oeuvres d'art, présentes dans nos musées, qui sont en même temps des objets religieux, ont été créées par le monde chrétien, pour célébrer la religion chrétienne.

Mais pour nos prêtres laïcs du politiquement correct, la chrétienté n'a plus le droit à l'existence, sinon pour expier éternellement sa présence au monde et son héritage spirituel.

Voilà ce qui explique l'incohérence flagrante, le gouffre logique dans lequel se précipitent les névrosés byzantins qui se lamentent sans fin face aux prétendus "problèmes éthiques" posés par l'existence du musée du Quai Branly.

Au lieu de se féliciter tout simplement -- mais justement, ce serait trop simple, trop facile -- qu'un nouveau musée permette à des millions de personnes du monde entier d'admirer des oeuvres d'art nouvellement proposées à leur regard, de découvrir des cultures jusque-là inconnues, de se sentir un peu plus humaines, un peu plus vivantes, en éprouvant intimement cette réalité éternelle: tous les peuples, à toutes les époques, ont éprouvé et éprouveront les mêmes émotions face aux joies, aux angoisses et aux mystères de l'existence, et ont trouvé, et trouveront, des moyens infiniment renouvelés et différents pour partager ces émotions avec leurs semblables, par-dessus les océans et les siècles.

PMB

Acord avec le dernier paragraphe du dernier texte de RM. Tout arrive !

Quant à exclure tous les objets d'art ou les objets sacrés des musées (mais heureusement qu'on ne m'en demandera pas la permission), je suis partagé : certes ils sont détournés de leur vocation première, certes parfois ils sont banalisés, voire vulgarisés (disons rendus vulgaires, rabaissés, la Joconde en boite à camembert ou Mozart en fond de galerie marchande). Mais aussi ils sont vulgarisés, c'est-à-dire offerts au peuple (le vulgus latin) qui autrement n'y aurait pas accès. Je suis moins choqué par les musées (et je n'entrerai pas dans la polémique sur celui-ci, faute d'assez d'éléments pour juger) que de savoir que tel chef d'oeuvre somnole chez un collectionneur qui ne le montre qu'à ses intimes, le comble de l'indécence ayant été atteint par un individu qui prétendit se fait enterrer avec un Van Gogh.

flamant rose

Dans un magnifique ouvrage sur l’histoire de l’art Hught honour et John Fleming disent que lorsque on parle d’art il nous faut être explorateur plutôt que critique, qu’il faut se défaire du postulat selon lequel la finalité première de l’art est le plaisir esthétique, souvent lié au prestige social, postulat mis en avant principalement par le marché de l’art et les collectionneurs eux-même en grande partie responsable de l’idée « d’art » communément admise en occident.

RM dit que « En fait, aucune oeuvre d'art n'a été créée pour se retrouver dans un musée, sauf les "oeuvres" de nombreux "artistes" contemporains qui n'ont été créées que pour cela, trahissant, ainsi, leur statut d'objet purement marchand et non d' oeuvre d'art, créé par et pour des esclaves volontaires du système capitaliste »

RM a probablement raison. Il n’est pas toujours facile d’avoir présent à l’esprit que cette idée, particulière liée à l’occident est relativement récente. Avant le 19éme siècle il était rare, voire inconcevable, de destiner une grande œuvre à une galerie marchande. L’art était au service de la religion, de la magie, d’une idéologie ou, plus rarement destiné à satisfaire les aspirations personnelles de l’artiste

Fradet

je voudrais préciser que, à ma connaissance, les musées ont commencé d'exister...au 19ème siècle. Cela mérite un peu de réflexion....

Fradet

je voudrais aussi ajouter ce commentaire
1. l'objet "d'art" a une fonction sacrée
2. il a une fonction d'embellissement de la vie et peu à peu d'expoisition dse son statut (il "se marchandise")
3. Avec Durand Ruel il devient un produit marchand ayant aussi une fonction d'embellissement et d 'exposition
4. il devient strictement un produit marchand.
Mais dès la phase 2 il est quand même un produit (il n' pas de fonction "d'Art" au sens matérialsite que nous lui donnons ou voulons lui imposer); il y a eu comme des Zidane du Foot des "artistes" (qui sont des pro de leur talent spécifique); citons Rubens, Vinci, Monnet...parmi tant d'autres "stars"

fradet

quelqu'un pourrait me dire à quoi sert un Ministère de la Culture?

Siganus Sutor

Qu'est-ce donc qui unit l'art des ‘indigènes’ d'Océanie, d'Amérique, d'Afrique ou d'ailleurs ? Quel est le dénominateur commun ? Serait-ce que dans l'œil de certaines personne c'est à peu près kif-kif bourrique ? Ce qui justifierait en conséquence ces arts amalgamés, mondialisés en quelque sorte, malgré l'absence d'unité géographique, malgré l'hétérogénéité des peuples concernés, malgré les différences de significations, qu'elles soient fonctionnelles, religieuses, esthétiques, ethniques, etc.

Qui est éligible et qui ne l'est pas ? L'art corse n'aurait-il pas sa place dans ce musée ? Ou des objets basques, passés ou présents ? Peut-être risquerait-on une bombe quelque part si on assimilait ces deux peuples-là à des “primitifs”, non ? Mais les muets de la militance, ne penseraient-ils rien, pour autant, d'être rangés chez ceux qu'on voit pour ainsi dire comme des sauvages ? (même si on ne le dit pas explicitement, même si on ne le dit plus explicitement — sans que l'image première n'ait fondamentalement changé dans les esprits). Si disons des pièces originaires des Seychelles étaient exposées là, les Seychellois ne seraient-ils pas amenés à penser qu'en France on les voit comme des primitifs ?

Ce musée ne manque sans doute pas d'intérêt. Il permet entre autres de se rendre compte que, de par le monde et en dehors de certaines modes et certains conformismes contemporains pseudo-créatifs, des gens ont exprimé ce qu'ils ressentent de façon plus intense et plus vraie que ces ‘plasticiens’ modernes ne se contentant que d'empiler des polochons à une biennale de Venise. Il expose dans sa grande variété ce que peut produire un esprit humain capable d'abstraction et de transcendance. A ce titre on ne peut qu'en faire la louange. Mais en ce qui concerne ce qu'il représente sous la forme proposée actuellement — à commencer par ce que sous-entend son nom —, il y aurait quand même comme un malaise à mon avis.

PMB

Siganus parle "des gens ont exprimé ce qu'ils ressentent de façon plus intense et plus vraie que ces ‘plasticiens’ modernes ne se contentant que d'empiler des polochons à une biennale de Venise".

Les plasticiens modernes, je ne les mettrai pas tous dans le même sac. Qu'il y ait parmi eux des escrocs ou des champions de l'ego surdimensionné (stop, je ne parle que des plasticiens*, aujourd'hui), c'est possible. Mais on ne peut réduire l’art actuel à cette vacuité bavarde. Qu'on se souvienne du mépris où furent tenus en leur temps les Impressionnistes (pour ne parler que d'eux). Qu'on se dise aussi qu'il n'est pas possible de peindre à nouveau la Joconde, et qu'il faut bien créer, avancer ; et avancer, en art, ça ne peut se faire que dans l'inconnu (J'allais dire : le noir, mais Soulages l'a trop bien fait pour que je m'y risque, allez donc à Conques).

Je suis d'autant plus à l'aise pour émettre cette réserve que les empilages de polochons, il m'est arrivé d'en voir sans que cela provoque en moi rien d'autre qu'une furieuse envie de me la peindre en vert.

Coïncidence amusante : on retrouve dans certaines oeuvres de l’Art Pauvre, notamment les créations à base de vieux outils en métal, ou encore dans les toiles de Gaston Chaissac, des thèmes et des techniques semblables à ceux des Arts Premiers. Et cela, sans qu’on doive parler de plagiat. Rien de nouveau sous le soleil...

* A l’entrée d’une ville de l’Aude dont, quelle honte, j’ai oublié le nom, sur un reste de mur d’enceinte, une grande explosion de couleur, comme un gigantesque patchwork, comme une voie lactée qui serait tout sauf blanche. On approche, on s’arrête, et on découvre que c’est l’oeuvre d’un de ces maudits plasticiens qui, aidé par les enfants-peintres des écoles, a utilisé... des bouteilles en plastique !

Abracadabra

Intéressant universalisme: les FRAC sont remplis d'horreurs qui se résument pour l'essentiel a de la production alimentaire, dont on ferait bien de s'interroger sur la façon dont elle se retrouve achetée par l'Etat. Dans le nouveau MAP, on trouvera le meme genre de produits, les sauvages n'étant pas si primitifs qu'ils en ont l'air.

PMB

Robert Marchenoir écrit dans Charlie-Hebdo, si, si, sous le pseudo d'Oncle Bernard, un remarquable texte nommé "Le musée du Quai Branly... ou la décharge néo-coloniale". Il y dit du mal autant du concept de l'expo que du musée lui-même.

Extrait : "A l'image des ces magnifiques poissons exotiques qui perdent leurs couleurs dès qu'on le sort de l'eau, toutes ces merveilles se fanent immédiatement au contact du sordide capitalisme compassionnel, qui aux nègres demande pardon et aux masses laborieuses du Nord conseille de découvrir l'art nègre."

Jubilatoire. Bon, Robert n'aurait peut-être pas écrit "capitalisme" ;-)

Et Chirac aura vraiment tout raté. Il y a quand même une justice.

eczistenz

Une autre point de vue, qui mérite le détour...
« Ainsi nos oeuvres d’art ont droit de cité là où nous sommes, dans l’ensemble, interdits de séjour »
mardi 27 juin 2006.

Talents et compétences président donc au tri des candidats africains à l’immigration en France selon la loi Sarkozy dite de « l’immigration choisie » qui a été votée en mai 2006 par l’Assemblée nationale française. Le ministre français de l’Intérieur s’est offert le luxe de venir nous le signifier, en Afrique, en invitant nos gouvernants à jouer le rôle de geôliers de la « racaille » dont la France ne veut plus sur son sol. Au même moment, du fait du verrouillage de l’axe Maroc/Espagne, après les événements sanglants de Ceuta et Melilla, des candidats africains à l’émigration clandestine, en majorité jeunes, qui tentent de passer par les îles Canaries meurent par centaines, dans l’indifférence générale, au large des côtes mauritaniennes et sénégalaises. L’Europe forteresse, dont la France est l’une des chevilles ouvrières, déploie, en ce moment, une véritable armada contre ces quêteurs de passerelles en vue de les éloigner le plus loin possible de ses frontières. Les oeuvres d’art, qui sont aujourd’hui à l’honneur au Musée du Quai Branly, appartiennent d’abord et avant tout aux peuples déshérités du Mali, du Bénin, de la Guinée, du Niger, du Burkina-Faso, du Cameroun, du Congo. Elles constituent une part substantielle du patrimoine culturel et artistique de ces « sans visa » dont certains sont morts par balles à Ceuta et Melilla et des « sans papiers » qui sont quotidiennement traqués au coeur de l’Europe et, quand ils sont arrêtés, rendus, menottes aux poings à leurs pays d’origine. Dans ma « Lettre au Président des Français à propos de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique en général », je retiens le Musée du Quai Branly comme l’une des expressions parfaites de ces contradictions, incohérences et paradoxes de la France dans ses rapports à l’Afrique.
A l’heure où celui-ci ouvre ses portes au public, je continue de me demander jusqu’où iront les puissants de ce monde dans l’arrogance et le viol de notre imaginaire. Nous sommes invités, aujourd’hui, à célébrer avec l’ancienne puissance coloniale une oeuvre architecturale, incontestablement belle, ainsi que notre propre déchéance et la complaisance de ceux qui, acteurs politiques et institutionnels africains, estiment que nos biens culturels sont mieux dans les beaux édifices du Nord que sous nos propres cieux. Je conteste le fait que l’idée de créer un musée de cette importance puisse naître, non pas d’un examen rigoureux, critique et partagé des rapports entre l’Europe et l’Afrique, l’Asie, l’Amérique et l’Océanie dont les pièces sont originaires, mais de l’amitié d’un Chef d’Etat avec un collectionneur d’oeuvre d’art qu’il a rencontré un jour sur une plage de l’île Maurice. Les trois cent mille pièces que le Musée du Quai Branly abrite constituent un véritable trésor de guerre en raison du mode d’acquisition de certaines d’entre elles et le trafic d’influence auquel celui-ci donne parfois lieu entre la France et les pays dont elles sont originaires. Je ne sais pas comment les transactions se sont opérées du temps de François 1er, de Louis XIV et au XIXième siècle pour les pièces les plus anciennes. Je sais, par contre, qu’en son temps, Catherine Trautman, à l’époque ministre de la culture de la France dont j’étais l’homologue malienne, m’avait demandé d’autoriser l’achat pour le Musée du Quai Branly d’une statuette de Tial appartenant à un collectionneur belge. De peur de participer au blanchiment d’une oeuvre d’art qui serait sortie frauduleusement de notre pays, j’ai proposé que la France l’achète (pour la coquette somme de deux cents millions de francs CFA), pour nous la restituer afin que nous puissions ensuite la lui prêter. Je me suis entendue dire, au niveau du Comité d’orientation dont j’étais l’un des membres que l’argent du contribuable français ne pouvait pas être utilisé dans l’acquisition d’une pièce qui reviendrait au Mali. Exclue à partir de ce moment de la négociation, j’ai appris par la suite que l’Etat malien, qui n’a pas de compte à rendre à ses contribuables, a acheté la pièce en question en vue de la prêter au Musée. Alors, que célèbre-t-on aujourd’hui ?
S’agit-il de la sanctuarisation de la passion que le Président des Français a en partage avec son ami disparu ainsi que le talent de l’architecte du Musée ou les droits culturels, économiques, politiques et sociaux des peuples d’Afrique, d’Asie, d’Amérique et d’Océanie ?
Le Musée du Quai Branly est bâti, de mon point de vue, sur un profond et douloureux paradoxe à partir du moment où la quasi totalité des Africains, des Amérindiens, des Aborigènes d’Australie, dont le talent et la créativité sont célébrés, n’en franchiront jamais le seuil compte tenu de la loi sur l’immigration choisie. Il est vrai que des dispositions sont prises pour que nous puissions consulter les archives via l’Internet. Nos oeuvres ont droit de cité là où nous sommes, dans l’ensemble, interdits de séjour. A l’intention de ceux qui voudraient voir le message politique derrière l’esthétique, le dialogue des cultures derrière la beauté des oeuvres, je crains que l’on soit loin du compte. Un masque africain sur la place de la République n’est d’aucune utilité face à la honte et à l’humiliation subies par les Africains et les autres peuples pillés dans le cadre d’une certaine coopération au développement. Bienvenue donc au Musée de l’interpellation qui contribuera - je l’espère - à édifier les opinions publiques française, africaine et mondiale sur l’une des manières dont l’Europe continue de se servir et d’asservir d’autres peuples du monde tout en prétendant le contraire. Pour terminer je voudrais m’adresser, encore une fois, à ces oeuvres de l’esprit qui sauront intercéder auprès des opinions publiques pour nous.
« Vous nous manquez terriblement. Notre pays, le Mali et l’Afrique tout entière continuent de subir bien des bouleversements. Aux Dieux des Chrétiens et des Musulmans qui vous ont contesté votre place dans nos c ?urs et vos fonctions dans nos sociétés s’est ajouté le Dieu argent. Vous devez en savoir quelque chose au regard des transactions dont certaines nouvelles acquisitions de ce musée ont été l’objet.. Il est le moteur du marché dit ’libre’’ et ’concurrentiel’’ qui est supposé être le paradis sur Terre alors qu’il n’est que gouffre pour l’Afrique. Appauvris, désemparés et manipulés par des dirigeants convertis au dogme du marché, vos peuples s’en prennent les uns aux autres, s’entretuent ou fuient. Parfois, ils viennent buter contre le long mur de l’indifférence, dont Schengen. N’entendez-vous pas, de plus en plus, les lamentations de ceux et celles qui empruntent la voie terrestre, se perdre dans le Sahara ou se noyer dans les eaux de la Méditerranée ? N’entendez-vous point les cris de ces centaines de naufragés dont des femmes enceintes et des enfants en bas âge ? Si oui, ne restez pas muettes, ne vous sentez pas impuissantes. Soyez la voix de vos peuples et témoignez pour eux. Rappelez à ceux qui vous veulent tant ici dans leurs musées et aux citoyens français et européens qui les visitent que l’annulation totale et immédiate de la dette extérieure de l’Afrique est primordiale. Dites-leur surtout que libéré de ce fardeau, du dogme du tout marché qui justifie la tutelle du FMI et de la Banque mondiale, le continent noir redressera la tête et l’échine. »
Aminata TRAORE
Essayiste et ancienne Ministre de la culture et du Tourisme du Mali

Siganus Sutor

Aminata Traoré, “militante altermondialiste”, saisit le prétexte du musée du Quai Branly pour revenir une fois de plus sur ses thèmes favoris : les méchants FMI et BM écrasent l'Afrique ; les Sudistes sont cruellement repoussés par des Nordistes dépourvus de cœur et occupés uniquement à adorer le Veau d'or ; les ultra-néolibéraux voient dans le marché le nirvana de toute vie terrestre ; et ainsi de suite.

Ce qu'elle dit sur le mode d'acquisition des pièces garnissant ce musée que, décidément, peu de gens ont l'air de vouloir appeler “des Arts premiers”, ce n'est sans doute pas faux. (Et il faudrait ajouter, pour faire bonne mesure, qu'il est aussi arrivé à l'État français de se porter acquéreur de quelques faux.) Mais on voit mal ce que tout cela a à voir avec “l'asservissement” économique actuel de l'Afrique à l'Europe et à l'Amérique du Nord, avec les flux migratoires et tutti quanti.

« Rappelez à ceux qui vous veulent tant ici dans leurs musées et aux citoyens français et européens qui les visitent que l’annulation totale et immédiate de la dette extérieure de l’Afrique est primordiale. »
On pourrait peut-être rappeler à Mme Traoré que cet abominable FMI (qui, me semble-t-il, n'était pas forcé de prêter de l'argent au Mali) a accepté d'annuler la dette de son pays : “13 pays africains obtiennent une annulation de 100% de leur dette” — http://www.afrik.com/article9231.html
Pour ma part j'ai emprunté de l'argent à une compagnie d’assurance afin de pouvoir me bâtir un toit au-dessus de la tête. Cette riche et profiteuse entreprise capitaliste, suceuse de mon sang innocent, ne pourrait-elle pas prendre exemple sur les institutions financières internationales ? Ça m'aiderait bien, je dois dire.

L'utilisation des commentaires est désactivée pour cette note.

France Identitaire

  • Je publie le 2 février 2012 "La France identitaire - enquête sur la réaction qui vient" aux éditions La Découverte. Un site est consacré à ce livre où vous trouverez la quatrième de couverture, la table des matières, l'introduction et une revue de presse qui sera mise à jour progressivement. Vous pouvez lire aussi des extraits du chapitre consacré à la gauche publiés sur Slate.fr.

Suivez-moi sur Twitter

Publicité