Les
contradictions éclatent bruyamment au sein du Parti socialiste. Depuis le choc
du 29 mai 2005, il n’est plus possible de noyer le poisson comme après le 21
avril 2002. Les fausses synthèses dont François Hollande s’était fait une
spécialité ne sont plus de mise. L’éclatement du PS face à la Constitution
européenne l’incite à clarifier ses positions sur la question phare de la
période : celle de la mondialisation et du libre-échange.
Le débat
violent autour du référendum a généré un clivage entre deux gauches
contrastées. Une gauche réaliste pour ses partisans, d’accompagnement pour ses
adversaires, « mélioriste » assurément, cherche à réorienter le cours
des choses. Prenant acte de l’existence d’une « société fragmentée »,
inquiète des « peurs » qui la traversent, elle entend humaniser le
cours impétueux de la mondialisation. On la retrouve à la droite du PS et chez
une partie des Verts.
En face,
une gauche de rupture ou de rejet, selon l’opinion que l’on en a, campe sur un
fier volontarisme. Convaincue de l’existence de « deux France » de
plus en plus éloignées, elle veut s’appuyer sur le salariat d’exécution pour
lutter contre la mondialisation libérale, fut-ce au prix d’un
néoprotectionnisme. Ses militants se situent à la gauche du PS, parmi les
Verts, au PCF et à l’extrême gauche.
La féroce
bataille dont le prochain congrès socialiste sera le théâtre n’est pas
réductible aux querelles de personnes même si le choc des ambitions
présidentielles est évident. Elle s’inscrit aussi dans un vieux débat entre
traditions historiques antagonistes. La gauche française a toujours été
tiraillée entre le pragmatisme et le radicalisme. L’opposition entre le PS et
le PCF n’a jamais complètement recoupé cette séparation : une fraction des
socialistes a régulièrement été gauchisante tandis que les élus communistes ont
souvent pratiqué une forme de social-démocratie.
Pour
autant, la pièce qui se joue à gauche n’a rien d’une répétition des épisodes
antérieurs. Les deux gauches qui s’affrontent aujourd’hui ne sont pas
structurées par des orientations idéologiques cohérentes. Des hésitations,
prudences, contradictions et incertitudes traversent les deux camps. Les
socialistes n’ont nullement à choisir entre le « social-libéralisme »
et la rupture avec le capitalisme. Contrairement aux années soixante-dix, le
clivage actuel oppose plus des sensibilités ou des tempéraments que des lignes
ou des projets contradictoires.
La droite
du PS avance avec une prudence de Sioux. Seul un marginal comme Bernard
Kouchner s’autorise à faire des clins d’œil à l’UDF. La jeune garde proche de
Dominique Strauss-Kahn jure qu’elle rejette le social-libéralisme. François
Hollande prône « un Etat fort et actif ». On constate avec amusement
que le mot Etat revient 13 fois dans sa contribution contre 19 pour celle de
NPS et 33 dans le texte signé par Laurent Fabius. Plus ou moins insistante, la
petite musique du retour à l’Etat berce l’ensemble de la littérature
socialiste.
La gauche
du parti n’est pas plus aventureuse. Loin de la « rupture avec le
capitalisme », Laurent Fabius suggère de « protéger et
progresser ». Si Jean-Luc Mélenchon, fidèle à son personnage, demande à
ses camarades de redevenir des « partageux », Henri Emmanuelli privilégie
le rassemblement de la gauche contre le libéralisme. L’extrême gauche elle-même
tente de se parer des plumes de la responsabilité. Le porte-parole de la LCR,
Olivier Besancenot, glose sur son éventuelle participation gouvernementale.
Histoire d’attiser les contradictions internes à la gauche.
La
ressemblance des programmes concrets des différents courants socialistes
atteste d’un réel continuum idéologique. Toutes en appellent à une
revalorisation des bas salaires, à un renforcement des services publics ou
encore à la mise en place d’une sécurité sociale professionnelle. Seul un
subtil dégradé de positions les distingue parfois. Prenons l’exemple de l’eau.
François Hollande et Laurent Fabius réaffirment haut et fort son appartenance
au « service public » tandis que NPS veut donner aux maires la
possibilité de la ramener dans la « gestion publique » et qu’Henri
Emmanuelli envisage une « nationalisation » revendiquée en urgence
par la LCR.
Au-delà de propositions concrètes parfois judicieuses, la pauvreté de la vision d’ensemble des différents courants du PS est frappante. L’identité de la gauche est à rechercher quelque part entre le rejet du libéralisme et un écologisme raisonnable. Un même brouillard entoure la conception du socialisme des uns et des autres. Les appels à la scission de Michel Rocard et de Bernard Kouchner, deux personnalités isolées, ne reposent sur aucune analyse sérieuse. Les socialistes n’auront pas à trancher, à leur congrès du Mans, entre deux voies incompatibles. Cela supposerait que la droite et la gauche du parti aient l’audace de se dépouiller de leurs faux-semblants. Nous n’en sommes pas là.
Article publié dans "Les Echos" du 26 août 2005
Encore une fois, on assiste à une véritable cacophonie au sein de l'appareil du PS, et des candidats en position de départ pour la présidentielle. Ces gens là, ne soucient guère des diffcultés réelles du peuple de gauche, eux se situent dans la classe moyenne haute, voire la bourgeoisie, n'auront pas de difficultés à se recaser en cas d'échec, contrairement à des employés ou ouvriers victimes de plans sociaux.
Et ces deux zigotos de Rocard et Kouchner, quand est-ce qu'ils vont prendre leur retraite politique? Il n'apport que de la confusion.
Qu'en pensez-vous? Je suis sceptique sur une victoire du candidat socialiste en 2007, face à une Nicolas Sarkozy, qui a le mérite d'être clair, et avance ses propositions (que je ne partage pas)? Surtout si on nous impose un retour de Jospin (j'ai voté pour lui en 2002, je ne le refairai pas en 2007).
Rédigé par : jerome | 27 août 2005 à 00h25
Vu de Belgique, ce déchirement au sein de la gauche française nous apparaît presque anachronique. Quoi, vous avez encore des communistes ? des marxistes ? des trotskistes ?
Dans notre petite Wallonie de 3 millions d'habitants, le PS est au pouvoir depuis (plus de ?) 40 ans... mais il est le seul que l'on retrouve à gauche de l'échiquier politique. Le PTB (parti des travailleurs de Belgique) ne recueille que des voix marginales puisées chez les "ouvriers syndiqués" (je simplifie).
Dans ce contexte, on peut comprendre que la droite démocratique (Mouvement Réformateur, rassemblement des forces libérales et centristes... de droite) cherche à puiser dans le fécond vivier socialiste. D'où cette appellation de "libéralisme social", chère à Louis Michel lorsqu'il était l'un des fers de lance du gouvernement fédéral.
Tout cela pour dire que, par-delà les frontières, le travail de nos hommes et femmes politiques ne semble se limiter qu'à une question d'opportunité.
Rédigé par : Ludovic | 27 août 2005 à 18h12
Le socialisme a toujours voulu faire de l'Etat, dompté (puisqu'à l'origine, ce "monstre froid" était policier),un arbitre suprême des conflits économiques.La voie du socialisme c'est l'appropriation de la machine étatique pour s'occuper de ceux qui ne possèdent pas de capital soit la majorité, et donc l'intérêt général.Et si le salut venait d'une candidature unique entre Verts et PS, en faveur de Nôël Mamère?
Rédigé par : die Rosa | 30 août 2005 à 09h51